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Biodiversité : restaurer nos liens au vivant

Biodiversité : restaurer nos liens au vivant
Le Courrier de l'UNESCO
juillet-septembre 2021
UNESCO
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Agnès Bardon

UNESCO

Raréfaction de certaines espèces, contraction des zones naturelles, pollution des sols et des eaux, modification des écosystèmes sous l’effet du changement climatique : les maux dont souffre la planète sont connus, documentés. Depuis longtemps. Des actions d’ampleur tardent pourtant à être mises en œuvre à l’échelle de la planète.

C’est pour accélérer les efforts consentis pour enrayer ce phénomène qu’a été proclamée la Décennie des Nations Unies pour la restauration des écosystèmes (2021-2030). La dégradation du vivant sera par ailleurs au cœur de plusieurs réunions importantes prévues en 2021 : le Congrès mondial de la nature organisé par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) en septembre à Marseille (France). Autre rendez-vous crucial : la Conférence des parties à la Convention sur la diversité biologique, ou COP 15, qui se tiendra en octobre à Kunming (Chine). Les 196 parties de la Convention auront pour mission de définir un cadre mondial post-2020 pour la biodiversité. En clair : fixer un cap à la communauté internationale afin d’améliorer la protection des écosystèmes à l’horizon 2050.

Une dégradation sans équivalent dans l’histoire

Il y a urgence. En mai 2019 à l’UNESCO, la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) a dressé un état des lieux alarmant. Chiffres à l’appui, elle a montré dans son rapport d’évaluation mondiale que la santé des écosystèmes se dégrade à une allure inédite. « Les activités humaines menacent d’extinction davantage d’espèces au niveau mondial que jamais auparavant », notent ainsi les experts de ce « GIEC de la biodiversité ».

Pas moins de trois quarts de l’environnement terrestre et près de 66 % du milieu marin ont été significativement modifiés par l’homme. Et sur les quelque huit millions d’espèces recensées sur la planète, un million sont déjà menacées d’extinction, soit une espèce sur huit, animale ou végétale, qui risque de disparaître dans les années à venir.

En cause : les activités humaines. La conversion des milieux naturels, notamment en terres agricoles et en zones urbaines, est la première cause de destruction et de fragmentation des habitats naturels. Viennent ensuite l’exploitation des ressources naturelles et la pollution des sols, de l’eau et de l’air.

Considéré longtemps comme un facteur aggravant, le changement climatique est désormais identifié comme un risque croissant. Entre autres effets, il provoque notamment un déplacement de certaines espèces vers les pôles, les sommets des montagnes ou les profondeurs des océans. Les espèces envahissantes sont un autre facteur d’extinction massif, notamment dans les îles où elles sont particulièrement dévastatrices pour la faune et la flore autochtones.

Tisser de nouveaux liens avec la nature

Le recul de la biodiversité met en jeu notre capacité à atteindre une bonne partie des objectifs de développement durable fixés par les Nations Unies à l’horizon 2030. En clair, il compromet l’avenir. La nature fournit en effet des services indispensables à l’existence humaine. Un chiffre pourrait résumer à lui seul cette dépendance : près de 75 % des cultures vivrières dépendent, au moins en partie, de la pollinisation. Les océans, les sols, les forêts absorbent 60 % des gaz à effet de serre émis par l’homme.

Les populations les plus pauvres sont en première ligne des changements qui affectent l’environnement. Gardiens vigilants d’au moins un quart des terres de la planète et de plus d’un tiers des territoires encore peu altérés par les activités humaines, les peuples autochtones veillent quant à eux sur un patrimoine de plus en plus convoité pour ses ressources naturelles.

Or ils sont souvent détenteurs de savoirs et de pratiques qui méritent d’être davantage préservés et valorisés, à l’image des actions menées dans le cadre du programme Systèmes de savoirs locaux et autochtones (LINKS) de l’UNESCO. Le savoir des Inuits sur la banquise, l’agriculture itinérante pratiquée par le peuple Karen du nord de la Thaïlande, les connaissances météorologiques des éleveurs d’Afrique de l’Est témoignent de la pertinence de ces savoirs qui rendent possible une vie humaine respectueuse des équilibres naturels.

Faire confiance au vivant

Si de nombreux voyants sont au rouge, les bonnes nouvelles existent. La mise à jour de la Liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature montre que certaines espèces se redressent à la faveur de politiques de conservation efficaces. Certaines espèces font par ailleurs preuve d’une résilience inattendue en s’adaptant à des environnements, comme les zones urbaines, très différents de leur milieu d’origine.

La désignation d’un nombre croissant d’aires protégées permet à l’homme de préserver les écosystèmes, à l’image du réseau des sites du patrimoine mondial, des réserves de biosphère et des géoparcs de l’UNESCO, qui couvre une zone de près de 10 millions de kilomètres carrés, soit l’équivalent de la taille de la Chine.

La Convention pour la diversité biologique va encore plus loin : dans le projet de texte qui servira de point de départ aux négociations à venir, ou « zero draft », elle propose aux 196 parties de s’engager à protéger au moins 30 % de la planète d’ici 2030. Le document préconise également de réduire d’au moins 50 % les pollutions chimiques et plastiques et de diviser par deux la progression des espèces les plus envahissantes dans certains sites prioritaires.

Les objectifs affichés sont ambitieux. Ils sont à la hauteur des enjeux.

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