Construire demain

Parce que l'architecture cristallise la façon dont nous voulons vivre, parce qu'elle engage notre avenir, elle est au centre des enjeux contemporains – en particulier celui du développement durable.

Un chiffre résume l’ampleur des défis : le secteur du bâtiment – construction et consommation énergétique comprises – représente 39 % des émissions mondiales de CO₂. Cette réalité illustre l’impérieuse nécessité de conduire une « révolution verte » de l’architecture, non seulement pour préserver notre planète, mais aussi pour en faire un lieu plus agréable à vivre.

Il n’existe pas une seule voie pour y parvenir : l’adaptation aux spécificités du climat, la transformation du bâti ancien et des usages, ou encore l’emploi de matériaux durables et non polluants, sont autant de pistes pour les architectes, urbanistes, ingénieurs et décideurs. Vous trouverez, dans ce nouveau et passionnant numéro du Courrier de l’UNESCO, des initiatives prometteuses et inspirantes, qui ont été déjà explorées avec audace et créativité.

L’idée d’une alternative au « tout-béton » n’est certes pas nouvelle. Certaines techniques, comme les savoir-faire liés à la conservation de l’architecture en bois au Japon, inscrite au patrimoine culturel immatériel de l’humanité, ont été perpétuées jusqu’à nos jours. À travers son programme du patrimoine mondial pour l’architecture de terre, l’UNESCO valorise et préserve également d’autres savoir-faire traditionnels, singulièrement en Afrique.

Dès les années 1950, des architectes visionnaires pratiquaient déjà ce que l’on n’appelait pas encore une « architecture durable », comme Hassan Fathy avec son village de New Gourna à Louxor, conçu à partir de matériaux locaux. En Inde, Laurie Baker inventait, dans les années 1960, une construction à coût modéré et écologique.

Désormais, les innovations se multiplient : une tour en bois en Norvège, le musée de demain à Rio de Janeiro avec ses systèmes de réglage de l’énergie solaire et de recyclage de l’eau, ou encore un immeuble modulaire accessible à tous au Canada, entre autres exemples.

Mais l’urgence climatique nous invite à aller plus loin et plus vite, pour créer un modèle global d’architecture davantage durable et inclusif. Car l'architecture ne se limite pas à concevoir des structures de bois, de pierre ou de verre ; elle est le reflet de nos sociétés comme de nos aspirations à construire un monde meilleur.

Dans un entretien au Courrier, l’architecte germano-burkinabè Diébédo Francis Kéré, Prix Pritzker d’architecture, à qui l’UNESCO a confié la conception de son futur Musée virtuel des biens culturels volés, disait vouloir « travailler avec la nature et non contre elle ». Et si cela devenait le maître mot de la profession ?

Audrey Azoulay
Directrice générale de l'UNESCO